[Francophones] renvoi de communiqué

Pierre Whalon bppwhalon at aol.com
Lun 11 Jan 10:28:08 GMT 2010


Avec mes excuses...une version brouillon a été transmise. Voici la copie finale:

Lettre pastorale aux fidèles et au clergé de la Convocation d’églises épiscopales en Europe
 
Mgr Pierre W. Whalon
Évêque
 
Paris, le 4 janvier 2010
 

Cher Peuple de Dieu,

Pendant notre convention en octobre à Genève, je n'ai pu m’empêcher de remarquer les affiches un peu partout montrant au premier plan une femme en tchador noir, l’air renfrogné et, à l'arrière-plan, des minarets en forme de missiles. “Votez ‘oui’ au ban des minarets” y était imprimé. Comme vous le savez, une majorité d'électeurs suisses a voté en faveur de la mise au ban.

Nous savons bien ce que c’est, comme le chante U2, que d'être des « Étrangers en terre étrange ». Parmi les plus de quatre mille fidèles de nos congrégations en Europe se trouvent beaucoup d’expatriés, pas seulement anglophones. Il y en a aussi beaucoup qui appartiennent à l’une de nos congrégations dans leur propre pays. C’est le cas aussi dans les congrégations du Diocèse de Gibraltar en Europe.

En réfléchissant à la décision suisse de bannir la construction de minarets, il m’est évident que nous ne pouvons pas nous considérer étrangers à la situation en Europe, que nous soyons ici pour une brève période ou pour toute une vie. Nous bénéficions ici de la liberté de culte, et devrions exiger de même dans nos patries.

Il n’en a pas toujours été ainsi. Par exemple, les paroissiens de St. Paul dans les murs à Rome, n’ont pu construire leur église qu’après que la nouvelle République d’Italie a annulé en 1870 les lois interdisant la présence d’églises non catholiques romaines dans cette ville. Nos églises en France ont aussi bénéficié de la loi de 1905 séparant l’Église et l’État. La liberté de culte est pour la plupart des occidentaux considérée comme acquise. Mais nous oublions (à notre péril ?) les très durs combats pour l’obtenir.

Durant presque toute l’histoire de l’humanité, chaque peuple n’avait qu’une seule religion, et tout le monde y participait, sans exception. La nationalité et la religion ne faisaient qu’un. e en fait. Dans l’antiquité, conquérir un peuple signifiait aussi détruire leurs dieux, qui n’avaient pas su le protéger. Ce qui explique la pratique usuelle d’anéantir le peuple ennemi défait, décrite par tous les historiens de l’antiquité que l’on retrouve aussi dans les premiers livres de la Bible. C’est aussi l’explication des guerres et massacres qui ont suivi les schismes dans l’Église, y compris la Réforme. En outre, ceux qui étaient n'adhéraient pas à la croyance communale étaient considérés comme dangereux au bien-être, voire au salut, de la communauté. Il n’y a que très récemment que l’on a compris qu’une nation peut comporter plusieurs religions.

Sur notre continent se sont déroulées les terribles guerres de religion au dix-septième siècle qui furent si meurtrières que finalement on a commencé à considérer le salut comme l’affaire des individus et non de la communauté. La naissance des démocraties modernes s'est accompagnée de l’avènement de la liberté de culte qui n'a été réalisée que de nos jours.

Ô qu’il est facile d’oublier ! Et oublier son histoire c’est la répéter. Dans notre situation, en particulier dans la Convocation mais aussi dans le Diocèse de Gibraltar en Europe, la liberté de culte nous est toujours très précieuse.

En tant que votre Évêque, je vous déclare qu’il nous faut déployer tous les moyens possibles pour soutenir ce droit. Il est tout aussi insensé d’interdire la construction de minarets au vingt-et-unième siècle que d’interdire la construction d’églises au dix-neuvième.

Certains qui ne sont pas citoyens européens diront que ce n’est pas notre affaire. Mais si, c’est notre affaire, et non seulement à cause du droit d’être épiscopaliens en Europe. Dans la patrie, où qu’elle se trouve pour chacun, ce droit a besoin d’être défendu. Tant que la liberté de culte ne sera garantie dans le monde entier, l’histoire tragique et sanglante des guerres interreligieuses et interconfessionnelles se répétera à outrance.

Certains répondront que le vote suisse, comme d’autres mesures prises en France ou aux Pays-Bas, ne concerne pas la liberté de religion mais vise plutôt l’identité nationale. Pourtant, les identités nationales en Europe et aux Amériques sont d’abord démocratiques. « La France est une nation, pas une race » nous apprend-t-on dans les écoles françaises. Ceci s’applique à tous les pays démocratiques — le système de gouvernance est le premier signe de l’identité nationale. Puisque les Américains sont presque tous des immigrés, ils sont le meilleur exemple de ce principe : être américain c’est prêter serment à la Constitution du pays. Nous autres européens devons en tirer la leçon, alors que nous cherchons à intégrer de plus en plus d’immigrés dans nos pays. Ceux qui sont immigrés dans nos pays doivent bénéficier de la même liberté de religion que tous les autres citoyens. Et nous devons tous œuvrer pour le maintien de ces droits démocratiques.

En même temps, ceux qui veulent immigrer en Europe doivent aussi soutenir ce système de gouvernance qui leur garantit la liberté de religion. Je ne suis pas d’accord avec la loi française qui interdit le port dans l'école publique de « signes ostentatoires religieux, » mais elle s’applique à tous. Je ne peux pas non plus porter ma tenue d’évêque —chemise violette, col romain, croix pectorale — dans une école publique aux Etats-Unis, et je ne peux pas être invité à m'adresser à une classe d'élèves. Suis-je d’accord ? Non. Mais cela s’applique à tous. Pouvons-nous faire changer la loi ? Bien sûr que oui, en participant aux processus démocratiques, mais non en y dérogeant.

Un autre exemple : la burqa, cet habit qui recouvre une femme des cheveux aux pieds, y compris le visage. Il est clair que cet habit n’est qu’une tradition culturelle—le Coran ne l’exige pas. En fait, la Bible et le Coran ont la même exigence : que les femmes s’habillent « modestement. » Ce qui de toute évidence se définit différemment dans des cultures différentes.

Une femme doit être libre de porter ce qui lui plaît chez elle—burqa, bikini, ou la plus simple tenue. Et dans nos pays elle a le droit de choisir : personne ne peut l’obliger à porter la burqa. La loi ne devrait pas la lui interdire en public non plus. Mais les us et coutumes de son pays s’appliquent à elle aussi. On ne se promène pas en robe de chambre ou au naturel en public—no se fa, comme disent les italiens. Chez nous, se couvrir le visage est la pratique de malfrats commettant un crime. En France, même les religieuses doivent ôter leur habit pour leur photo d’identité. En fait, on ne peut porter aucun uniforme, y compris le col romain, pour cette photo. Si vous n’êtes pas d’accord, œuvrez pour faire changer la loi. Mais n’insistez pas pour être bien reçue en public si vous portez la burqa.

Voici donc l’équilibre qu’il nous faut maintenir : entre le besoin du maintien des droits de démocratie constitutionnelle et le besoin du respect de la loi. Ceci veut dire que chacun d’entre nous doit s'engager dans la politique de nos pays. Nos congrégations devraient aussi nous encourager à maintenir cet équilibre entre les droits et les responsabilités dans nos démocraties constitutionnelles, car notre droit de liberté de culte est essentiel.

Dès les premiers jours, les chrétiens ont été tenus comme responsables du bon ordre des communautés où nous vivons (Romains 13.7). Comme dit Jésus, nous devons être « sel et lumière » pour les autres. Au vingt-et-unième siècle, cela se traduit par l’obligation de participer à nos démocraties, lutter pour les droits de l'homme, en élaborant et en appliquant les lois, et vivre de façon responsable sous la loi.

Que chacun s’applique à faire son devoir.=
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